Unité – Ya’Ya Heit et la santé mentale autochtone
Points clés
- Reconnaître le colonialisme en tant que déterminant distal de la santé et du bien-être des peuples autochtones et le rôle que la Loi sur les Indiens continue d’exercer sur leur santé mentale et leur bien-être.
- Comprendre les impacts des forces juridiques et historiques sur les circonstances matérielles actuelles, la santé mentale et le bien-être des peuples autochtones.
- Valoriser les expériences autochtones en matière de santé mentale et de bien-être.
Des contenus
Les contenus dans cette unité de Ya’Ya’ Heit sont sa puissance poétique et son art, qui honorent ses frères Yvon Michael Starr et Andy Clifton dans le contexte de leur héritage Gitxsan et de leur appartenance à la maison de Geel, la principale maison du clan Fireweed à Kispiox, en Colombie-Britannique. À gauche, un détail du totem de Ya’Ya « Moi & mes 2 frères décédés » et en dessous, un vers d’un poème qu’il a composé à la mémoire de leur vie et de leur mort :
Mon frère Andy Clifton est mort en 1999
Am Hon c’était son vrai nom
Y’était la première personne que je connaissais qu’y avait le SIDA
J’avais ben peur avant
Et lui too
Évaluation des contenus
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- Des contenus : Apprentissage autodirigé – flexible
- Évaluation : Visualisation du colonialisme – 15 minutes
Objectifs pédagogiques
Par rapport aux colons canadiens, les peuples autochtones (en tant que population) souffrent de considérablement plus de problèmes de santé. Ils vivent moins longtemps et subissent des taux plus élevés de maladies et de pauvreté. Ils font face à plus de discrimination et de marginalisation sociale. Ils ont également un accès plus limité à l’éducation et à l’emploi. Tout cela signifie, très concrètement, qu’une personne autochtone qui souffre d’une maladie mentale vit AUSSI probablement une vie plus difficile et marginalisée que la personne non autochtone qui éprouve des troubles mentaux comparables.
Ya’Ya Heit est un artiste renommé de la Première Nation Gitxsan de la vallée du fleuve Skeena au nord de la Colombie-Britannique au Canada. Pour de nombreux théoriciens, universitaires, activistes communautaires autochtones et même pour les artistes comme Ya’Ya Heit, l’acuité des troubles mentaux DOIT être envisagée comme une conséquence directe du colonialisme au Canada. Dans ce cadre théorique, le colonialisme est reconnu en tant que « déterminant distal » de la santé et du bien-être. Autrement dit, comme l’illustre l’art de Ya’Ya Heit, la santé mentale et le bien-être des peuples autochtones au Canada ne peuvent être dissociés de l’histoire et du prolongement du colonialisme.
Ya’Ya Heit a fait don de ses œuvres à la section Histoire en Tête dans le but d’encourager les étudiants à réfléchir sur les liens entre la santé mentale et l’histoire difficile du colonialisme et des peuples autochtones au Canada. Cette idée fondamentale, qui se retrouve au cœur des œuvres de Ya’Ya Heit, est un concept essentiel à retenir dans cette leçon. Les instructeurs peuvent utiliser l’art et la poésie de Ya’Ya comme médium pour véhiculer cette analyse.
Mise en contexte des contenus
Ya’Ya Heit est né dans la maison de Geel, la principale maison du clan Fireweed à Kispiox. Son nom Gitxsan est Axgagoodiit. Il a mentionné dans des entrevues que la politique et la justice exercent une forte influence sur ses œuvres, lesquelles ont été exposées dans le monde entier. Plus récemment, Ya’Ya œuvre à la sculpture de deux panneaux pour Osgoode Hall à Toronto. Il est membre du comité consultatif du Health Arts Research Centre (HARC) (Centre de recherche sur l’art et la santé) dans le nord de la Colombie-Britannique. Pour de plus amples renseignements sur l’artiste, consulter sa biographie ici.
Comme l’exprime clairement l’art visuel et littéraire du chef héréditaire Ya’Ya Heit, les enjeux de santé mentale et de bien-être s’avèrent peut-être encore PLUS difficiles chez les autochtones que chez les non-autochtones.
Cependant, avant d’explorer ce sujet, il est toutefois utile de préciser quelques points.
En premier lieu, la constitution canadienne reconnaît trois groupes distincts de peuples autochtones : les Premières Nations, les Inuits et les Métis. En deuxième lieu, tout comme les peuples non autochtones au Canada, ces groupes sont remarquablement diversifiés et occupent des territoires géographiques très variés. Leur histoire et leurs protocoles socioculturels sont uniques et en constante évolution. En troisième lieu, les processus du colonialisme au Canada, qui ont de manière générale commencé par la déterritorialisation des Premières Nations pour que les colons s’approprient leurs terres et leurs ressources (pratiques qui existent encore aujourd’hui et qui empêchent ces peuples de réclamer ce qui leur appartenait), ont encore DAVANTAGE catégorisé les peuples autochtones, particulièrement en vertu de la Loi sur les Indiens. Cette loi, introduite en 1867 dans le but d’adresser « le problème indien » (la façon de gouverner les peuples considérés par les sujets coloniaux comme étant des sauvages indisciplinés voués à la disparition) définissait ce qu’était un « Indien » (et ce qui ne l’était pas), les responsabilités de l’État envers ces peuples et leurs droits.
Malgré quelques modifications, la Loi sur les Indiens est toujours en vigueur, ce qui incite de nombreux peuples autochtones (y compris Ya’Ya Heit à travers son art) et en particulier les Premières Nations (les Métis et les Inuits n’étant pas régis par la Loi sur les Indiens) à faire valoir qu’ils sont gouvernés de manière différente, voire même inférieure à la norme, comparativement à ceux qui ne sont PAS régis par la Loi sur les Indiens. Le fait d’être régi par cette loi comporte de réelles conséquences dans le quotidien des Premières Nations. Ces peuples vivent sur des réserves indiennes, des lieux déterminés arbitrairement par le gouvernement fédéral. Bien qu’elles existent à l’intérieur des frontières provinciales, les réserves sont considérées comme étant des biens fonciers fédéraux. Or, les compétences provinciales telles que l’éducation et les soins de santé sont financées et administrées au niveau fédéral. Cela se traduit par des couches de bureaucratie supplémentaires et, par conséquent, de nombreuses personnes qui vivent sur les réserves indiennes, y compris Ya’Ya, reçoivent des niveaux de financement inégaux par rapport aux personnes qui vivent hors réserve.
La Loi sur les Indiens a en plus catégorisé les peuples autochtones, avec des conséquences qui se répercutent encore aujourd’hui. Ainsi, la loi définit certains peuples autochtones en tant « qu’Indiens inscrits » et d’autres en tant « qu’Indiens non inscrits ». Les « Indiens inscrits » sont eux-mêmes classés sous deux statuts 6 (1) ou 6 (2), qui résultent de l’octroi rétroactif du statut par le gouvernement fédéral aux Autochtones, auxquels il l’avait retiré entre 1867 et 1985. Le problème est le suivant : si un « Indien inscrit » du statut 6 (2) (personne ayant reçu le statut APRÈS 1986) a un enfant avec un « Indien non inscrit » (c’est-à-dire la GRANDE majorité des gens au Canada et dans le monde entier), cet enfant n’est pas reconnu comme un « Indien » au Canada. La Loi sur les Indiens n’accorde qu’un petit nombre de droits aux « Indiens inscrits » des Premières Nations, à savoir une quantité minime de soins de santé et de fonds d’éducation supplémentaires en reconnaissance de l’expulsion des habitants originaux de leurs territoires lors de la colonisation du Canada. Moins il existe « d’Indiens inscrits », moins il en coûte au gouvernement du Canada.
D’un point de vue d’ensemble de la santé et du bien-être des peuples autochtones au Canada, l’existence même d’un système de classification pour les « Indiens inscrits » marginalise davantage les peuples autochtones. C’est aussi un sujet abordé par Ya’Ya Heit dans son art. Par exemple, lors d’une récente entrevue à la radio de la SRC portant sur un totem sur lequel il travaille, Ya’Ya décrit son œuvre comme étant une « déclaration politique qui dénonce la Loi sur les Indiens ». Il perçoit celle-ci comme étant à l’origine des problèmes d’alcoolisme, de santé et d’économie de sa communauté, qui sont tous liés à la santé mentale ou au bien-être. Heit a fait la remarque suivante : « Je pense lui donner un titre… Qui donc pourrait bien vouloir de ces satanées chaînes? où les chaînes symbolisent la Loi sur les Indiens. Je me mets donc à leur place et cette fois-ci, je suis accompagné de mes trois ancêtres là-haut qui veillent sur moi. Ils étaient libres », a déclaré Heit, « donc je me bats et comme mes ancêtres, je souhaite un meilleur lendemain au Canada. Désormais, je ne perds aucunement espoir puisque j’ai des enfants », a ajouté Heit.