Module Médecine et pouvoir
Points clés du module
- Observer les déséquilibres de pouvoir dans le système de santé mentale entre ceux qui fournissent et ceux qui utilisent les services.
- Comprendre que les droits humains sont fondamentaux aux soins sur le plan de l’éthique et de la compassion.
- Reconnaître l’intérêt à traiter la personne dans son entier, et l’importance critique de considérer l’expérience vécue, l’histoire et la culture afin de créer des partenariats respectueux et équitables entre le patient et le praticien.
Contenus du module
- Des documents, des commentaires audio et une histoire personnelle marquante exposant l’histoire de la stérilisation au Canada.
- De l’art et de la poésie évoquant une perspective autochtone sur la santé mentale, ainsi qu’un texte contextuel tissant des liens entre le colonialisme, la Loi sur les Indiens et les messages de ses œuvres.
- Un spectacle de marionnettes de 5 minutes sur l’importance des systèmes de guérison dans le traitement intégral de la personne. Créé par Lori, experte communautaire.
- Une sculpture autobiographique dotée d’un titre provocateur, réalisée par deux experts communautaires partageant un vœu sincère de création de partenariats de guérison dans le domaine de la santé mentale.
- Un vidéo de 6 minutes sur « L’Interrogateur », l’alter ego d’une patiente luttant pour sa propre identité. Créé par Irit Shimrat, experte communautaire.
Évaluation du module
En utilisant le matériel du module comme point de départ, demandez aux étudiants d’écrire une lettre de 250 mots en tant que praticien-ne d’aujourd’hui, faisant preuve de compassion. Les lettres des étudiants devront expliquer comment les déséquilibres du pouvoir dans le système de santé mentale peuvent mener à des erreurs dans la pratique, et de là les étudiants auront à présenter un scénario alternatif considérant la personne dans son entier et illustrant une relation patient-praticien respectueuse et équitable. Demandez aux étudiants d’adresser leur lettre à l’une des personnes suivantes :
- Doreen Befus
- Lori E.
- Ya’Ya Heit
- Alistair Scott-Turner
- Dana Allan
- Irit Shimrat
Objectifs pédagogiques du module
Q: Quelle est la différence entre un médecin et Dieu?
R: Dieu ne se lève pas le matin en pensant qu’il est un médecin.
Ce genre de blague (pas seulement drôle) témoigne d’une perception généralisée et répandue selon laquelle les médecins – incluant les autres praticiens de la santé mentale – détiennent un énorme pouvoir en comparaison aux patients qu’ils traitent. Historiquement et encore aujourd’hui, les lois, les structures professionnelles et les décisions politiques ont renforcé le pouvoir médical, même à travers la transition radicale des institutions vers des services de santé mentale communautaires, les espaces dans lesquels le pouvoir médical se sont déplacés et de nouveaux corps professonniels sont entrés en scène. Dans ce module, nous avons inclus du matériel portant sur l’histoire de la stérilisation approuvée par l’État, légale en Alberta jusque dans les années 1970, comme une étude de convaincante d’un abus de pouvoir de la part de professionnels et de l’État dans le but d’une présumée amélioration de la santé mentale.
L’«expertise» des professionnels est perçue de façon à leur conférer la capacité de prendre des décisions dans le meilleur intérêt des patients : en pratique, plusieurs personnes à l’extérieur du milieu médical trouvent le jargon médical incompréhensible et se sentent intimidées ou incertaines pendant qu’elles sont vulnérables ou malades, incapables d’offrir des perspectives personnelles ou dissidentes. C’est certainement quelque chose que les experts communautaires de notre projet ressentent profondément parce qu’ils vivent vraiment avec ce déséquilibre du pouvoir et ce à tous les jours. Tous ont fait part d’expériences oppressives dans l’accès à des services de santé mentale. Certains ont témoigné avec éloquence de ce qu’ils ont appelé le «regard psychiatrique», une sorte d’attitude généralisée et condescendante face aux personnes avec un profil de santé mentale hors norme. La santé mentale devient alors la SEULEet UNIQUE facette par laquelle un individu est considéré, éclipsant toutes les autres dimensions et réalités de sa personne. D’autres dans le groupe ont corroboré les préoccupations d’universitaires écrivant à propos du pouvoir des professionnels en santé mentale à l’effet que la tendance dominante à considérer les problèmes de santé mentale comme des pathologies d’ordre biologique font que les facteurs sociaux, politiques et économiques affectant la vie de la personnes sont ignorés.
La très grande majorité des partenaires communautaires – qui tous avaient vécu la réalité de la médicalisation – croient que les professionnels devraient reconnaître l’impact de leurs décisions sur les patients. Les personnes ayant vécu une relation intime avec le pouvoir de la médecine croient que ceux qui détiennent ce pouvoir devraient travailler en partenariat avec les patients. Ils ont identifié trois grandes tendances dans les pratiques des professionnels en santé mentale qu’ils considèrent oppressantes : l’autoritarisme professionnel, le manque de formes holistiques de traitement et un manque de respect dans les communications.
C’est définitivement un espoir des personnes qui ont collaboré à ce module, et qui ont prêté leur voix et leur histoire et donné de leur temps pour créer ces ressources pédagogiques, de voir les nouvelles générations de professionnels en santé mentale, de théoriciens et de travailleurs sociaux devenir conscients de ce déséquilibre du pouvoir qui, historiquement – et bien souvent encore aujourd’hui – s’impose dans les relations médicales et de soins. Leur souhait est que, grâce à ces connaissances, le pouvoir puisse être perturbé.